Précipitations.

J’ai entendu la première goutte. Son explosion a résonné entre les rues, les vitres ont tremblés. Puis il y a eu le grand silence. J’ai remarqué que les oiseaux s’étaient tus depuis longtemps. Je n’ai pas eu le temps de réfléchir, déjà les trombes d’eau s’abattaient sur nous en muraille liquide. Infranchissable. Quelque chose disait l’anormal, mais on ne percevait plus rien d’autre que la pluie obsédante. Et puis on espérait se tromper. Que ça passerait. Ça n’est pas passé. Ça a empiré. C’était le déluge, au sens propre. Bientôt les murs commencèrent à fondre. De grandes coulées de peintures et de plâtres, de terre et de chaux grise. Les toitures elles-même fissurèrent. L'eau s'infiltrant partout, elle s'attaqua rapidement à toutes sortes de piliers, fondations, cloisons. Toutes les constructions étaient touchées par le phénomène.

Etrangement il y a eu assez peu d’inondations, la terre semblait pouvoir se gorger indéfiniment du ciel. Seuls quelques hallucinés construisirent des arches, les prix des bateaux s’envolèrent. Mais se fut à peu près tout. D’ailleurs plus rien ne pouvait voler. Les idées elles-mêmes s’étaient alourdies semblait-il. Au début on ne parlait que de ça : la pluie. Milles théories, plus encore de conférences, de scientifiques, de prédicateurs. Rien n’y fit, il pleuvait toujours. Les météores se foutaient bien des prévisions mathématiques ou métaphysiques. Alors, petit à petit, on s’y est fait. On a oublié le soleil et le bleu du ciel, et même ce que voulait dire le mot « sec ». On a pris notre partie de la situation. Pendant que les murs fondaient. On a maintenant tous les doigts plissés de la douche permanente, peut-être que nos enfants auront des branchies. Peut-être aurons-nous complétement oublié la musique dans ce vacarme continu, quand tous les murs auront fini de fondre.




Aucun commentaire: