Tes impers malléables.


Et de trois qui font douze, tu as mis huit moi avant de trouver ta paire de neuf.
Il pleuvait à l’heure pile.
Et de cinq qui font un, ta main a glissé sous un deux trop paternel.
Plic ploc les gouttes vont par milles unités.
Et de treize qui font onze, tes fleurs du mal ont péri sous le nombre de tes maîtres bien compensés.
ça a tout débordé.
Et de quatre pieds qui font sonner tes sept mains, les rythmes se perdaient en paire de claques.
Pas foutu de faire l’addition de tes pertes.
Et de toi qui fais vous, tu as perdu le compte de tes vaines impaires à la vingts deuxième heure de page publicitaire.
Les maths fuies dans la tasse en porcelaine.

Il est cinq heures, laisses tomber tes illudivisions ; j’ai envie de trois fois ton poids lourd pour le thé.

Marins d’eaux sous-cutanées.


Vous vous êtes présentés, un aurore, en surface. Vous surfiez vos vagues communes, derrière les geysers de tous les jours. Vous buviez la tasse régulièrement, en petites plongées dominicales. Pas de quoi vous noyer cependant, la colère vous faisait flotter. Vous avez voulu de l’interface, un midi, en contrepartie d’un contact difficile. Et vous vous êtes bousculés ensemble, de chaque coté de la glace. Vous pleuriez, becs ouverts, vos trop grands reliefs atomiques. Vous vous agitiez vainement pour lisser vos démarches comme-il-faut. Vous vous en vouliez demain, déjà, mais hier sera pire, vous vous en doutiez, en silence. Et quand tout c’est mis en mouvement, vous avez cru agoniser en exile de vos plans à deux dimensions. Avez-vous bien pris vos doses de décolorant ? Il semble que vous tachetez à l’autre bout de vos flottaisons intimes. Personne ne peut plus rien pour vous, ça mousse sous vos nages toutes pareilles. La marée basse s’éloigne encore, les sangs seront beaux à la prochaine éclipse.

Mon sac de billes.


Mon sac de billes est tout troué, tout mité, tout aéré. Je n’ai jamais pu me résoudre à les ranger dans des boites étiquetées – boulets, calots, mammouths, minis, maxis billes ; j’assume donc les pertes récurrentes de mes yeux de chats. J’éparpille mes billes sans le décider vraiment. Une, deux, dix, cent. Elles filent sur les parquets cirés avec le bruit de la grêle sur la vitre. Dix, cent, milles billes qui glissent et déstabilisent les gens autour. La foule s’écarte pendant que je joue aux équilibriste, résolue à laisser courir. Parfois, accidentellement, quelqu’un prend le temps d’en ramasser pour moi. Cela n’a aucune utilité, fondamentalement le cul de mon sac est tout poreux, mais cela permet un échange membranaire, un instant. Cent, mille, mes millions de billes perdues et retrouvées, mes petits nerfs plantés là, sans arrosage excessif.
Mon sac de billes est tout troué, merci de ne pas m’en offrir d’autre. Je ne saurais pas quoi en faire.

La légende des six doigts.


Nous étions six, nous étions sans pareil, nous étions les forces vives des échos hallucinatoires. Nous assurions les classes savamment brillantes des vies de luxe et de luxures.
Nous étions légendaires, déjà, parmi les cataphiles des vies profondes comme les gorges des chanteuses de Gospel. Nous étions, si j’ose dire, les messies des êtres à moitie vides sur cène à moitié pleine.
Quand nous marchions ensemble, les trottoirs s’élargissaient comme des pupilles sous influence. Dans ces regards citadins on trouvait la preuve de nos existences magnifiques. Nous ombres elles-mêmes s’illuminaient de la géniale absence et le hasard nous confiait ses secrets dans le murmure imprévisibles de nos aléas. Cela nous donnait l’aura des êtres jamais étonnés, des paumes toujours levées.
Nous étions six, nous étions sans pareil.

Mouvements.


J’ai l’instinct de nos mouvements. Je ne me satisfais pas des voyages intérieurs. Je suis absente, c’est vrai. Mais là, toujours. Souvent plus là que ceux-là qui se prétendent là. Y es-tu ?

J’ai les espaces superposés et les latitudes variables. Mes longitudes remontent facilement le cours des temps de mes altitudes souterraines. J’ai les trajets récurrents mais je n’en connais aucun bout. Je fais des cercles en 576 dimensions satellitaires.

J’ai la présence d’esprit de ne pas savoir où cela peut mener. J’ai déjà trop croisé mes jours, je fini par confondre. Mes milliards de particules élémentaires ondulent au gré des incommensurables univers qu’elles rencontrent. Les tables des marées sont difficilement programmables.

Autant dire que je n’y suis pour pas grand-chose sinon d’y être.

Résistance.

Je suis nue.
Je suis nue et sans mur. C'est-à-dire sans porte ni fenêtre.
Je suis nue de peau, nue de coeur, nue de cheveux. Je suis nue dans l'air, nue dans l'eau, nue sur le lit.
Je suis nue de mes entrailles à vif.
Je suis nue d'autrui.
Je suis nue, est-ce indécent ? Je suis nue des musiques internes. Je suis nue sans esthétisme et sans honte, sans remord. Je suis nue sans l'avoir voulu.
Je suis nue sans faiblesse, nue visiblement.
Je suis nue en profondeur de la nudité superficielle.
Nue sous les pas et nue sur la distance. Nue dans la durée, nue de mes nuits éclairées et de mes sombres jours. Je suis nue sans n'avoir rien perdu. Je suis nue sans l'innocence, sans culpabilité.
Je suis nue comme une femme.

Regrets à vendre.

J’avais des regrets et je ne le savais pas.
Je les ai transportés malgré moi, clandestins de mes humeurs.
Ils m’étouffaient par derrière les nuits de déroute, les jours de manque.
Car s’il est une chose que les regrets ne supportent pas, c’est bien d’être ignorés.
J’avais des regrets et je ne le savais pas.
Ils déambulaient, mal fagotés en amour. Hurlaient en colères ravalées.
J’avais tout plein de remord au fond des gorges déployées, par dessus les sourires échappés.
J’ai des regrets, maintenant je le sais. Je cherche encore comment les décoller de ma peau maculée.
J’ai des regrets, je suis dans la merde.